Solution ci-dessous...
Alors, on veut donc trouver deux dés à 6 faces tels que le résultat du lancer de ces dés
ait la même loi de probabilité que celui de deux dés normaux...
Une première solution consiste à utiliser la force brute ; écrire un programme
qui teste les 13^12 configurations en faisant un histogramme pour chaque cas et
en le comparant avec l'histogramme de deux dés normaux...
Une deuxième solution est d'établir progressivement des conditions sur le nombre de
faces à k points en se servant de l'histogramme désiré. Le raisonnement commencerait
ainsi : "On ne veut pas pouvoir faire 0 ou 1, il est donc impossible d'avoir un dé avec
une face vide et l'autre avec une face vide ou avec un point. Donc, si l'un des dés a
une face vide, chaque face de l'autre contient au minimum deux points. Plus précisément,
il ne pourrait y avoir sur cet autre dé qu'une face à deux points sinon la probabilité de
faire 2 serait strictement supérieure à 1/36...etc etc.
Une troisième solution consiste à téléporter le problème dans un cadre mathématique.
Hmmm, comment modéliser l'équivalence du comportement de deux paires de dés ?
Pour deux dés, il est possible de faire un histogramme du nombre de différentes configurations
(face1, face2) qui aboutissent au même résultat (i.e. à la même somme). On a alors :
même comportement ⇔ même histogramme.
Sur l'histogramme, à chaque nombre k est associé le nombre h(k) de façons de faire k avec les
deux dés. Par exemple h(3) = 2 parce que (1,2) et (2,1) sont les 2 lancers qui permettent
de faire 3 (quinito ;) ). Mais attention, si deux faces d'un même dé sont identiques,
il faut les compter deux fois. Notons na le nombre de faces 'a' d'un dé
(a ∈ [|0,12|], na ∈ [|0,6|]).
Définissons sur [|0,12|]2 la relation d'équivalence
(a,b) ~ (c,d) ⇔ a+b = c+d ;
l'ensemble-quotient associé va permettre de reconstituer l'histogramme.
Comment trouver le cardinal d'une classe ? Prenons une classe quelconque, et choisissons
un représentant (a,b). Les membres de la classe sont tous
les éléments de la forme (a+u,b-u) avec u entier et
(a+u,b-u) ∈ [|0,12|]2, soit encore de la forme
(k,a+b-k) avec k entier et (k,a+b-k) ∈
[|0,12|]2 (ces conditions équivalent en fait à k ∈ [|0,a+b|]).
Donc le cardinal de la classe concernée est Σk ∈ [|0,a+b|] 1 = a+b+1.
Hmmmm. De même, la hauteur de l'histogramme en a+b est
h(a+b) = Σk ∈ [|0,a+b|] (nk na+b-k)
Et là, c'est la révélation : le problème de la détermination de l'histogramme peut se ramener
à effectuer une multiplication polynômiale.
Considérons le polynôme n1 = X+X2+X3+X4+X5+X6. Celui-ci va représenter un dé normal.
n2 = n1 va être l'autre dé normal. En fait, pour un polynôme f = Σ(akXk),
chaque monôme akXk symbolisera l'ensemble des faces à k points du dé ; ak sera le cardinal de cet ensemble.
Dans ces conditions, le nombre de faces d'un dé f est Σ(ak) (i.e. f(1))
et le nombre de points sur le dé est Σ(k ak) (i.e. f'(1)).
L'intérêt de tout ceci est que la paire de dés (f1 ; f2) va être
représentée par le produit p = f1 * f2 (bla bla bla
produit de Cauchy des séries génératrices bla bla bla). Dans la notation
polynômiale, les lancers qui donnent le résultat k sont regroupés dans le monôme en Xk,
leur nombre est
ak(p) =
Σi=0..k ( ai(f1)i ak-i(f2)k-i )
Donc, le but du jeu se ramène finalement à factoriser
p = n1 * n2 en produit
de 2 polynômes g et h tels que chacun ait ses coefficients
positifs et de somme 6. D'acc ?
Bon, p = n1 * n2
= [X+X2+X3+X4+X5+X6]2.
Chance incroyable, parce que ceci est [X(X6-1)/(X-1)]2,
et X6-1=(X-1)(X+1)(X2+X+1)(X2-X+1).
Donc p = X2 (X+1)2 (X2+X+1)2
(X2-X+1)2.
Il doit y avoir quelque chose comme 81 factorisations possibles de p en 2 polynômes g et h.
Voyons comment exploiter g(1) = h(1) = 6. Cela impose en fait que g et
h soient des multiples de (X+1) (X2+X+1) (simplement parce que 6 = 2 * 3).
Aha, il n'y a plus que 9 possibilités. Pour éliminer les doublons (g ↔ h),
imposons à g d'avoir le plus grand degré, et en cas d'égalité, d'avoir le plus grand
degré en X. Restent alors 5 possibilités pour g, celles qui répondront au problème
seront celles pour lesquelles ak(g) et ak(h) ≥0:
X2 (X2-X+1)2 (X+1) (X2+X+1) = X9+X7+X6+X5+X4+X2 ⇒ h = X3+2X2+2X+1 √
X2 (X2-X+1) (X+1) (X2+X+1) = X7+X6+X5+X4+X3+X2 ⇒ h = X5+X4+X3+X2+X+1 √
X (X2-X+1)2 (X+1) (X2+X+1) = X8+X6+X5+X4+X3+X ⇒ h = X4+2X3+2X2+X √
X (X2-X+1) (X+1) (X2+X+1) = X6+X5+X4+X3+X2+X ⇒ h = g √
(X2-X+1)2 (X+1) (X2+X+1) = X7+X5+X4+X3+X2+1 ⇒ h = X5+2X4+2X3+X √
Moralité : 5 paires de dés se comportent comme des dés normaux : d'une part (quelle surprise)
les dés normaux (1,2,3,4,5,6), d'autre part les paires (2,4,5,6,7,9;0,1,1,2,2,3),
(2,3,4,5,6,7;0,1,2,3,4,5), (1,3,4,5,6,8;1,2,2,3,3,4), et (0,2,3,4,5,7;1,3,3,4,4,5).
Remarque 1 : si on interdit les faces vides, c'est plus simple car g et h
doivent être multiples de X (parce que le nombre de faces vides du dé f est le
terme en X0, i.e.f(0), et on veut qu'il soit nul).
Du coup il n'y a plus qu'une paire de dés anormaux (appelés dés de Sicherman).
Remarque 2 : Si on s'intéresse aux dés à n faces, la première étape est alors de factoriser
[X+X2+...+Xn]2, ce qui revient en gros à réduire
Xn-1 sur R. Hé bien, sur C, Xn-1 vaut
πk e2ikπ/n.
On regroupe les racines conjuguées et c'est gagné. En fait cela revient à écrire p comme
produit des polynômes cyclotomiques de rang d où d parcourt l'ensemble des diviseurs de n.
Voilà, si tu n'as rien compris ce n'est pas grave, moi non plus :)
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